Disparu il y a trois décennies, Cheikh Anta Diop, auteur du célèbre Nations nègres et culture, était à la fois historien, anthropologue, mais aussi homme de sciences. Elève parallèlement de Gaston Bachelard et de Frédéric Joliot-Curie, le Sénégalais avait, grâce à ses travaux de recherche pluridisciplinaires, restitué à l’Afrique son histoire, rompant avec la vision coloniale selon laquelle les Africains étaient des peuples sans passé. Ses thèses sur l’africanité de l’Egypte pharaonique ont profondément bouleversé les mentalités.
Le 7 février 1986, disparaissait Cheikh Anta Diop. Ce grand historien sénégalais, qui faisait partie de la génération des intellectuels noirs de la Seconde Guerre mondiale, a profondément marqué les esprits des Africains jeunes et moins jeunes par son œuvre ambitieuse et subversive, qui voulait réinscrire le continent noir au cœur de l’histoire universelle d’où trois siècles de domination coloniale occidentale avaient fini par la bannir.
Le nom de Cheikh Anta Diop demeure associé à tout jamais à deux grandes idées qui ont révolutionné la pensée historique africaine au XXe siècle : l’africanité de l’ancienne Egypte (ou « l’Egypte nègre » selon l'expression de l'historien), et les origines africaines de l’humanité et de la civilisation. Des idées dont la proclamation n’allait pas de soi en pleine période coloniale, tant les préjugés liés à l’infériorité de la race noire et au mythe du nègre « prélogique » étaient alors fortement enracinés. Faire triompher ces idées, en s’appuyant sur des preuves précises puisées à la fois dans les sciences exactes et dans les sciences humaines, tel fut le combat de toute la vie de Cheikh Anta Diop.